http://www.senat.fr/questions/base/2016/qSEQ16051441S.html
Question orale n° 1441S de Mme Pascale Gruny (sénateur de l’Aisne)
Mme Pascale Gruny attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion sur les moyens dont disposent les personnes handicapées pour se constituer une épargne.
Il existe actuellement deux formules d'assurance permettant aux personnes handicapées de se constituer un complément de ressources : la rente survie, souscrite par un parent, et l'épargne-handicap, souscrite par la personne handicapée.
La rente survie permet à l'un des deux parents ou aux deux parents d'un enfant handicapé de souscrire auprès d'une compagnie d'assurances, soit individuellement, soit par contrat collectif, un contrat ayant pour objet le versement, à compter de leur décès, d'une rente viagère au profit de leur enfant handicapé. L'épargne-handicap est quant à elle souscrite par la personne handicapée elle-même et garantit à l'assuré le versement d'un capital ou d'une rente viagère à son terme (la durée effective devant être au moins égale à six ans).
Seules les rentes versées au titre du contrat de rente survie peuvent être cumulées sans limitation avec l'allocation pour adultes handicapés (AAH), alors que le montant imposable des rentes issues d'un contrat épargne handicap ne doit pas excéder 1 830 euros annuels sous peine de voir l'AAH réduite à due concurrence (article D. 821-6 du code de la sécurité sociale).
Dès lors, bien que présenté comme un des outils les plus performants dont disposent les personnes handicapées désireuses de se constituer un complément de ressources, le contrat épargne handicap reste un contrat accessoire dans la mesure où il ne permet de créer qu'une très faible rente.
Une étude a démontré que, sur 6 000 contrats souscrits par les parents au bénéfice de leur enfant dans le cadre de contrats de rente survie, la moyenne des rentes annuelles servies s'élève à 2 875 euros. Dès lors, par parallélisme, un plafonnement annuel à 2 875 euros permettrait au contrat épargne handicap de jouer pleinement son rôle et d'offrir une alternative intéressante au contrat de rente survie.
Bien que tant attendue par les personnes handicapées et leurs familles depuis de nombreuses années, cette disposition n'a fait l'objet d'aucun décret. Elle s'interroge sur les intentions et les moyens qui pourraient être mis en œuvre par le Gouvernement à ce sujet.
Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé des personnes âgées et de l'autonomie publiée dans le JO Sénat du 12/10/2016 p. 14728
Madame la sénatrice, la question que vous posez concerne la prise en compte des ressources des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, et notamment des produits d'épargne spécifiques que sont, d'une part, la rente survie, d'autre part, le contrat d'épargne-handicap.
Tout d'abord, je vous rappelle que l'AAH est un minimum social individuel destiné à assurer des conditions de vie dignes aux personnes en situation de handicap. Son montant tient compte des ressources de la personne et éventuellement de celles de son conjoint. Le montant de l'AAH attribué vient compléter les éventuelles autres ressources du bénéficiaire – pension d'invalidité, revenus d'activité professionnelle, revenus fonciers, pension alimentaire, intérêts de produits d'épargne imposables, etc. – afin d'amener celles-ci à un niveau garanti.
De surcroît, le complément de ressources, au titre de la garantie de ressources aux personnes handicapées, la GRPH, et la majoration pour la vie autonome, la MVA, peuvent venir s'ajouter à l'AAH. En revanche, cette allocation ne tient aucunement compte de l'aide qui peut être apportée par des tiers, notamment par les autres membres de la famille.
Les ressources sont appréciées dans les conditions fixées à l'article R. 821–4 et suivants du code de la sécurité sociale auxquels vous faites référence. Sont ainsi exclues les rentes viagères constituées en faveur d'une personne handicapée ; dans la limite d'un montant fixé par décret à 1 830 euros, les rentes constituées par une personne handicapée pour elle-même ; et la prime d'intéressement à l'excédent d'exploitation versée à une personne handicapée admise dans un établissement et service d'aide par le travail, ou ESAT.
J'en viens plus précisément aux produits d'épargne spécifiques que sont la rente survie et le contrat d'épargne-handicap.
La rente survie permet précisément à des parents ou à un tiers de constituer un capital afin d'assurer des ressources à une personne handicapée, en général un enfant. Elle est donc de fait exclue de la base des ressources considérée au titre de l'AAH.
A contrario, le contrat d'épargne-handicap permet aux personnes handicapées d'épargner pour elles-mêmes à des conditions favorables par rapport aux autres produits d'épargne. C'est pourquoi ces ressources sont prises en compte dans le calcul de l'AAH : elles constituent bel et bien des ressources en propre.
Cela étant, seuls les montants supérieurs aux 1 830 euros annuels sont pris en compte dans le calcul de l'impôt sur le revenu, et donc de l'AAH.
Par ailleurs, je vous rappelle que le patrimoine des bénéficiaires de l'AAH n'est pris en compte ni dans le calcul de cette allocation, ni dans celui des aides personnalisées au logement, les APL.
Parallèlement, le mode de calcul de la prime d'activité a été adapté à la situation des bénéficiaires de l'AAH, mais aussi aux bénéficiaires d'une pension d'invalidité ou d'une rente accident du travail-maladie professionnelle, rente dite « AT-MP ». Ainsi, ce dispositif est rendu plus attractif pour les personnes éloignées de l'emploi et pour les travailleurs en ESAT.
Pour conclure, sachez que le rapport de M. Christophe Sirugue sur la refonte des minima sociaux a donné lieu, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017, à des mesures favorables aux bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé : l'AAH 1 pourra désormais être attribuée pour une période de vingt ans, contre dix ans jusqu'à présent, et ne requiert plus une demande préalable d'allocation de solidarité aux personnes âgées, ou ASPA, pour les bénéficiaires de plus de 65 ans.
Un chantier est par ailleurs ouvert pour la refonte de l'ensemble des minima sociaux, AAH comprise. Ce travail se fonde sur un principe intangible : préserver la situation des personnes et simplifier leur parcours.
Mme Pascale Gruny. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie des informations que vous me communiquez. Ma proposition consiste précisément à porter le plafond applicable aux contrats d'épargne-handicap au niveau du montant moyen des contrats de rente survie. Cette mesure reviendrait à exclure environ 1 000 euros supplémentaires des ressources annuelles considérées pour le calcul de l'AAH.
L'AAH garantit effectivement un minimum indispensable ; mais, vous le savez, les personnes handicapées éprouvent des difficultés financières dans leur vie quotidienne. C'est là un grave sujet d'inquiétudes de la part des familles. À cet égard, je relaye une demande formulée par de nombreux parents, qui se préoccupent du sort que connaîtra leur enfant handicapé après leur décès.